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13 juin 2018

Les cancres de ROusseau

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Les cancres de Rousseau
d'Insa Sané

Ed. Sarbacane
Coll. Exprim'
16 € / 2017 / 330 p.

La 4ème de couverture"Depuis toujours on nous considérait comme des cancres. Bon ! C'est vrai : on ne pouvait pas s'empêcher d'être nous-mêmes, des gamins élevés à la dure qui remettent en question l'autorité. On se bagarrait, on était insolents, on séchait les cours, on était source de problèmes."

1994, Sarcelles, Djiraël en est sûr, cette année sera exceptionnelle. Il entre en terminale, dans la même classe que ses potes Sacha, Jazz, Rania et les autres. En plus, la belle Tatiana semble enfin réponde à ses avances... Cerise sur le gâteau, le prof principal, c'est monsieur Fèvre - le seul qui s'intéresse à eux. Bref, c'est parti pour une année d'éclate... sauf que parfois, plus on prévoit les choses, moins elles se passent comme on le pensait.

Mon avis : Voilà un auteur que je ne connaissais pas mais que je vais m'atteler à découvrir car cette première lecture m'a vraiment séduite !

Le lecteur rentre dans l'univers de Djiraël, un adolescent en Terminale ES à Sarcelles. Sarcelles, ville connue pour sa banlieue difficile, qui ressemble en tous points à celle dans laquelle je travaille (à part qu'à Sarcelles il y a un lycée, ce qui n'est pas le cas dans la commune où je travaille malgré les 3 collèges et les 27 000 habitants, bref)

Djiraël et sa bande de copains, inséparables depuis des années. Il y a Sacha, une jeune fille garçon manqué qui doit s'occuper seule de son père alcoolique, Jazz, le passionné de musique dont le père a déserté le foyer familial depuis longtemps, Rania, belle jeune fille qui fait tout pour ne pas se faire remarquer depuis que ses parents adoptifs ont eu un enfant naturel, Armand, qui a du mal au lycée, et Doumam l'intello. Et puis il y a Djiraël. Djiraël est bon élève, mais il a beaucoup de colère en lui. Colère contre son père, toujours absent, colère contre les adultes du lycée, qui ne semblent pas le respecter, colère contre la misère sociale dans laquelle son quartier évolue. Djiraël est fait pour la politique ! D'ailleurs, il décide de se présenter aux élections pour être délégué. Mais pas facile de se faire élire quand les profs, le CPE et le Proviseur préféreraient un élève modèle à ce poste. 

Djiraël est très amoureux de Tatiana, ça fait des années qu'il lui court après. Alors quand Djiraël doit choisir entre l'élection, ses amis, et Tatiana, il ne sait plus où donner de la tête !

J'ai adoré l'écriture d'Insa Sané ! On est tout de suite pris par le récit, on évolue avec les personnages et leurs sentiments, on comprend chacun d'eux et on ne juge pas parce qu'on sait ce qui les a amené là. Bien sûr, dans Djiraël et ses amis, je retrouve une grande partie mes élèves. Je retrouve le quartier, si bien décrit par l'auteur; je retrouve les situations familiales, toutes (ou presque) bien trop dures à gérer pour des enfants. Je retrouve cet énorme sentiment d'injustice, cette colère qui en qualifie certains, mais aussi ce désir de s'en sortir, quel que soit les moyens employés. 

Je dois quand même dire que le discours sur l'Education Nationale m'a beaucoup gênée. Même si je respecte totalement ce texte, cette vision de l'auteur dont on sent bien qu'il a mis une grande part de lui dans ce texte. Déjà, il dit que les profs qualifient ce groupe de "cancres". Or, un élève qui a 13 de moyenne de terminale, je crois que mes collègues et moi en rêvons ! Jamais il nous viendrait à l'idée d'utiliser ce mot pour un élève comme Djiraël. Et puis il y a beaucoup de passages sur le lycée où seul M. Fèvre trouve grâce à leurs yeux. Tous les autres profs semblent détester leurs élèves, le CPE est vraiment une ordure et le Proviseur pas mieux. Je sais bien qu'il y a des profs qui sont comme ça, mais bon la grande majorité des profs ça me semble un peu bizarre quand même... Et puis différentes réflexions montre la méconnaissance du système éducatif (ce qui n'est pas gênant en soi mais Djiraël semble très sûr de lui pour le reste alors un lecteur qui ne connaît pas le système le croirait sur parole !)

"On a les profs qu'on mérite, paraît-il... Ici, c'était la banlieue des déshérités, on ne nous avait pas refilé le haut du panier. Le seul à sortir du lot, c'était Monsieur Fèvre, le prof d'économie. Ah, lui ! On se demandait ce qu'il pouvait encore foutre là, à Sarcelles. Avec son expérience et les résultats qu'il obtenait, il aurait pu être muté dans n'importe quel bahut huppé de la région." (p.23)

"Mercredi dernier, Djiraël et moi on a épluché les comptes du Foyer Socio-Educatif... On est assis sur plus de 250 000 billets, les gars !" (p.92)

"Après avoir fait vibrer son fameux double menton, le CPE m'a invité à le suivre dans son bureau. [...]
-On ne va pas tourner autour du pot, jeune homme. Je ne vous porte pas dans mon coeur..." (p.213)

"Mais vous ne trouvez pas qu'il en a déjà assez fait ? Ce métier... surtout en Zone d'Education Prioritaire... Hé bien, ce métier l'a usé. Il mérite de se reposer." (p.242)

"On avait travaillé dur, jusqu'à pas d'heure. Sérieux ! On n'avait jamais été aussi motivés. La majorité des profs s'attendaient à ce qu'on se plante : il était hors de question de leur donner raison." (p. 327)

J'ai beaucoup aimé la vision de la maman. Au lieu de montrer une mère dépassée par ses nombreux enfants et son mari toujours absent, Djiraël dépeint sa mère comme forte, indépendante, gérant sans encombre sa famille et décidant de reprendre ses études. Un bel hommage ! Par contre, la plupart des pères sont décrits, au mieux comme absents, au pire comme de véritables boulets que les enfants doivent soutenir. 

"Et puis, je ne comprenais pas Maman. Elle, si forte et indépendante, qu'avait-elle besoin d'un homme qui la plupart du temps s'enfermait dans son jardin secret, passait la moitié de l'année à aller jouer le héros en terre étrangère, pour revenir parader un mois en famille et se payer du bon temps avant de repartir ? Au lieu de l'envoyer balader, elle lui trouvait sans cesse des excuses." (p.105)

"Maman, l'Africaine amazone, n'a pas attendu Olympe de Gouge pour être libre et égale à l'homme en droits. Plus encore, elle était le socle de notre foyer. Alors, bien sûr, en bon chef de famille, elle a employé toute son énergie à nous réconcilier, le daron et moi." (p.171)

+ d'infos :
-La présentation de l'éditeur
-L'avis de Orbe

Petit bac 2018

Catégorie Gros Mot : CANCRES (ligne générale 4)

emprunté à la med

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